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Bergamotte

Interview de Romain Raffard

Nom  Bergamotte

Fondateurs  Romain Raffard et Loïc Reperant

Année de création  2015 (exit en 2021)

Secteur d’activité  livraison de fleurs à domicile

Comment est né le projet Bergamotte ?

Mon co-fondateur Loïc et moi-même avions créé en 2012 notre première startup, Localers, une société mettant en relation des voyageurs étrangers avec des guides locaux en France pour vivre des expériences uniques. Les attentats de 2015 et leurs conséquences sur le tourisme en France, et particulièrement à Paris, nous ont toutefois poussé à envisager une solution de repli rapidement.

Nous souhaitions continuer à travailler dans le B2C mais nous n’avions pas d’idée préconçue. Nous sommes tombés dans l’univers des fleurs totalement par hasard. Cela a été une espèce de faisceau de circonstances concordantes : un article TechCrunch sur une boite américaine ayant la même activité, une visite à Rungis nous permettant de rencontrer notre futur fournisseur qui deviendra par la suite notre actionnaire, une dispute avec ma femme qui m’a permis de tester l’offre concurrente…

Tout cela a façonné notre souhait de réinventer la façon dont les fleurs étaient livrées sur internet. Le marché était alors dans une situation oligopolistique forte avec des acteurs de référence qui n’avaient pas fait évoluer leur proposition de valeur depuis longtemps. On s’est dit que la façon de trouver notre product market fit n’était non pas de disrupter l’industrie mais simplement de refaçonner en profondeur, sur l’ensemble de la chaîne de valeur, l’expérience client avec en parallèle l’idée d’incarner la première marque forte dans cet univers assez concurrentiel.

Finalement, c’est l’alliance tech/marque qui nous a permis d’émerger assez rapidement.

Qu’est-ce qui vous a amené à l’exit ?

Après plusieurs levées de fonds, force était de constater que notre modèle économique initial n’était pas tenable à long terme ; nous ne parvenions pas à compresser nos pertes malgré l’augmentation du volume, c’était une fuite en avant permanente… Nous doublions notre chiffre d’affaires mais également nos pertes. Nous avons donc réorganisé l’ensemble de notre modèle économique. La crise du COVID est arrivée quelques mois plus tard, alors que notre société était rentable, et nous en sommes sortis renforcés. C’est ce qui nous a permis d’être approchés par notre futur acquéreur Bloom & Wild à l’été 2020.

Les discussions sur une potentielle acquisition sont arrivées à un moment où nous pensions à tout sauf à vendre car considérablement renforcés par notre réorganisation économique. Il nous a fallu six mois pour accepter l’idée qu’une acquisition était la meilleure solution pour Bergamotte. En effet, notre croissance n’était pas sans fin malgré notre lancement réussi en Allemagne et en Autriche et nous avions conscience que notre capacité d’autofinancement ne nous permettait pas de prendre le leadership en Europe occidentale. Deux solutions s’offraient donc à nous : lever à nouveau des fonds, mais avec le risque de retomber dans les dérives passées (à savoir des pertes qui augmentent et un chiffre d’affaires pas tout à fait linéaire) ou envisager une opération de LBO. A ce moment-là nous n’envisagions pas d’autres solutions car nous ne croyions plus au rachat industriel.

Finalement la voie M&A est arrivée de manière fortuite mais nous a permis d’entrevoir un scénario couplant les atouts d’une levée de fonds et d’un LBO puisqu’elle nous permettait d’avoir un horizon de liquidité rapide et d’alimenter notre ambition en terme de développement à la fois en France et en Europe.

En janvier 2021, six mois après avoir été approchés par Bloom & Wild, nous nous sommes rendus à l’évidence : la voie M&A était la meilleure solution à privilégier.

Quels sont vos conseils pour un exit réussi ?

1-   Rencontrer ses concurrents le plus tôt possible et maintenir de bonnes relations avec eux : on ne sait jamais d’où viendra l’exit.

2- Impliquer très tôt toutes les parties prenantes de la table de capitalisation : en tant qu’entrepreneur, il est primordial d’avoir un soutien de l’intégralité de son board et de ses actionnaires.

3-  Impliquer une poignée de managers pour avoir leur soutien : ces managers seront des ambassadeurs du deal en interne et pourront aider les salariés à gérer la nouvelle et le choc que constitue un exit. Cela permet également à l’entrepreneur de se concentrer sur le deal M&A pendant que les managers suivent les affaires courantes.

4- Discuter avec ses pairs entrepreneurs : l’exit n’a rien d’instinctif et tout est inédit – il est donc indispensable de s’entourer d’entrepreneurs ayant déjà réalisé des exit qui prodiguent des conseils essentiels dans la conduite des négociations.

5-  S’entourer d’avocats expérimentés : Il est essentiel de s’entourer d’avocats expérimentés, ayant déjà mené à bien ce type d’exit et qui seront donc en capacité de mener les négociations à leur terme.

Qu’est-ce qui a été le plus difficile entre le lancement de Bergamotte, les levées de fonds et l’exit ?

100 fois l’exit ! L’exit est un enjeu patrimonial, un enjeu d’héritage, mais également un enjeu humain énorme car les équipes sont déjà constituées. Un deal pouvant s’arrêter à tout moment, l’exit est également un ascenseur émotionnel permanent.